Le Nutri-Score, un indicateur insuffisant pour choisir correctement ses aliments

 
 
 

L'ultra-transformation des aliments est fortement associée au risque de mortalité, d'après une nouvelle étude. © mizina, Adobe Stock

 

L’étiquette du Nutri-Score ne suffirait pas pour permettre au consommateur de choisir ses produits alimentaires. Selon des chercheurs italiens, le degré de transformation des aliments doit être directement indiqué sur les produits, car l’ultra-transformation présente plus de danger pour la santé qu’une mauvaise composition nutritionnelle.

Quel aspect de la nutrition est le plus associé au risque de mortalité ? Une nouvelle étude publiée dans The British Medical Journal part du postulat que les aliments ne sont pas seulement caractérisés par leur composition nutritionnelle, mais aussi par leur degré de transformation.

Nutri-Score et Nova : deux systèmes de classification liés

Pour rappel, les aliments ultra-transformés sont des formulations industrielles fabriquées en déconstruisant des aliments entiers en constituants chimiques, en les modifiant et en les recombinant avec des additifs. Ils appartiennent au groupe 4 de la classification Nova qui répertorie les aliments en fonction de leur degré de transformation plutôt que de leur teneur en nutriments.

Développé en France, le Nutri-Score indique la qualité nutritionnelle d'un aliment (par exemple sur la base de la teneur en graisses, en sel, en fibres, etc.) par une échelle de cinq couleurs. Il devrait bientôt permettre un étiquetage nutritionnel frontal uniforme au niveau européen.

Il faut savoir que ces deux systèmes de classification sont liés, puisque plus de 80 % des aliments identifiés comme « malsains » par le Nutri-Score sont également ultra-transformés. S'ils ont été séparément signalés comme associés à de mauvais résultats en matière de santé dans des cohortes de population du monde entier, leur impact conjoint sur la santé n'avait pas été évalué dans de grandes cohortes.

Les chercheurs italiens ont suivi pendant 14 ans près de 22.900 adultes (âge moyen 55 ans ; 48 % d'hommes), en tenant compte à la fois de la composition nutritionnelle du régime et du degré de transformation des aliments.

Comme trouvé dans de précédentes études, le Nutri-Score et la classification Nova sont tous deux associés à la mortalité (cardiovasculaire et toutes causes confondues). Mais les modèles statistiques utilisés par les chercheurs leur ont également permis de constater dans quelle mesure l'excès de risque associé à une mauvaise alimentation pouvait être dû à l'ultra-transformation des aliments, et l'inverse.

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Avoir directement accès à l’information sur le degré de transformation des aliments

« Nous avons constaté qu'une partie de l'excès de mortalité associé aux régimes de mauvaise qualité est expliquée par le fait que ces régimes sont également ultra-transformés, rapporte Marialaura Bonaccio, épidémiologiste et premier auteur de l'étude. À l'inverse, il est peu probable que l'excès de risque de mortalité associé aux régimes riches en aliments ultra-transformés soit imputable à la faible qualité nutritionnelle de ces aliments. »

Pour les chercheurs, il est essentiel que les consommateurs aient également connaissance du degré de transformation des aliments, et pas seulement du Nutri-Score. « Nous devons nous concentrer sur les aliments que le Nutri-Score classe comme sains d'un point de vue nutritionnel mais qui sont également hautement transformés », explique dans un communiqué Giuseppe Grosso, coauteur de l'étude. « C'est le cas par exemple de certaines boissons qui, bien qu'elles aient une teneur réduite en sucres, donc adéquates d'un point de vue nutritionnel (lettre B dans le Nutri-Score), sont en fait hautement transformées. »

Une solution globale consisterait à rendre les aliments frais et peu transformés disponibles, attrayants et abordables. Et soutenir les initiatives visant à promouvoir les repas préparés à base d'aliments frais et peu transformés, en utilisant de petites quantités d'ingrédients culinaires et d'aliments transformés.

Aliments ultra-transformés : encore des raisons supplémentaires de réduire leur consommation

Dans le cadre d'une large étude sur la consommation d'aliments ultra-transformés chez des hommes et des femmes, des chercheurs ont trouvé que les hommes qui en consommaient beaucoup présentaient davantage de risques de développer un cancer colorectal que les autres.

Présents dans quasiment tous les rayons de nos supermarchés, les aliments ultra-transformés sont souvent caractérisés par une faible qualité nutritionnelle et par la présence d'additifs alimentaires et de composés provenant des emballages de contact. S'ils composent 31 % de l’assiette des Français, la situation est pire aux États-Unis, où ils représentent 57 % du total des calories quotidiennes consommées par les adultes.

Une équipe dirigée par des chercheurs des universités de Tufts et de Harvard montre un lien entre les aliments ultra-transformés et le cancer colorectal chez les hommes. Les résultats de leurs travaux viennent de paraître dans The British Medical Journal.

Pourquoi une nouvelle étude ?

De précédentes études ont rapporté qu'une consommation élevée d'aliments ultra-transformés était associée à un risque accru de développer tous les types de cancers. Les chercheurs ont estimé que, parmi eux, le cancer colorectal pouvait être particulièrement influencé par l'alimentation.

« Les viandes transformées, dont la plupart entrent dans la catégorie des aliments ultra-transformés, constituent un facteur de risques important de cancer colorectal, a déclaré dans un communiqué de l'université de Tufts Lu Wang, coauteure de l'étude. Les aliments ultra-transformés sont également riches en sucres ajoutés et pauvres en fibres, ce qui contribue à la prise de poids et à l'obésité ; or l'obésité est un facteur de risque avéré de cancer colorectal. »

Trois grandes cohortes américaines ont rassemblé plus de 200.000 participants (dont ¾ de femmes) dans le cadre d'une étude sur 25 ans. Tous les quatre ans, chaque participant a été amené à renseigner sa fréquence de consommation d'environ 130 aliments, répartis en catégories d'aliments ultra-transformés. Les participants eux-mêmes ont ensuite été classés suivant leur fréquence de consommation de ce type d'aliments.

En étudiant le risque de cancer colorectal dans son ensemble et par sous-sites anatomiques, les chercheurs ont trouvé une association positive entre la consommation d'aliments ultra-transformés et le cancer distal du côlon. © Sebastian Kaulitzki, Fotolia

Pires catégories : les produits à base de viande ou de poisson et les boissons sucrées

Sans surprise, les plus gros consommateurs d'aliments ultra-transformés étaient les plus à risque de développer un cancer colorectal. Toutefois, si le lien global était établi pour les hommes (29 % de risques supplémentaires par rapport aux faibles consommateurs), les femmes étaient seulement concernées par certains sous-groupes d'aliments ultra-transformés.

Chez les hommes, le lien le plus fort entre les aliments ultra-transformés et le cancer colorectal provenait des produits prêts à consommer à base de viande (comme les saucisses, le bacon ou le jambon) ou de poisson. La deuxième catégorie d'aliments incriminés comprenait les boissons sucrées, comme les sodas et les boissons à base de fruits.

Si les résultats trouvés sont différents pour les femmes, « des recherches supplémentaires devront déterminer s'il existe une véritable différence entre les sexes dans les associations, ou si d'autres facteurs de confusion non contrôlés chez les femmes ont atténué le lien » écrivent les auteurs. Au rayon des surprises, ces derniers ont trouvé une association inverse entre les aliments laitiers ultra-transformés comme certains yaourts et le risque de cancer colorectal chez les femmes. Ces aliments pourraient contrecarrer les effets néfastes d'autres types d'aliments ultra-transformés chez les femmes, notre alimentation résultant d'une association de nutriments.

Comment expliquer cet impact de l'ultra-transformation sur notre santé ? « Le rôle potentiel des additifs alimentaires dans la modification du microbiote intestinal et la promotion de l'inflammation, ainsi que les contaminants formés au cours de la transformation des aliments ou migrant à partir de l'emballage des aliments peuvent tous favoriser le développement du cancer », a résumé Fang Fang Zhang, épidémiologiste du cancer.


La source: FUTURA

Auteur: CLAIRE MANIÈRE

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